Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/120

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— Qui me parle ? demande-t-elle d’une voix tremblante.

Aimez le roi, répète encore la voix.

Mais ces mots, qui la font tressaillir, elle veut savoir qui les profère. La voix semble venir du boudoir dont la porte donne près de son alcôve ; elle se lève, jette une pelisse sur elle, et va ouvrir la porte du boudoir ; là, elle ne peut s’empêcher de rire en voyant la cause de tant de surprise et d’effroi.

C’était une jolie petite perruche, parée d’un collier de rubis ; et juchée sur les barreaux dorés d’une cage de cristal. Quand madame de la Tournelle approcha de la cage ouverte, la perruche vint se placer sur son épaule, et répéta d’une voix claire et brève : Aimez le roi, aimez le roi, aimez le roi.

— Oui, oui, je t’entends bien, dit-elle en présentant sa belle main à l’oiseau.

Ensuite elle le caressa, lui donna du sucre, puis revenant dans son lit, elle se mit à causer avec la perruche, comme l’aurait pu faire un enfant de douze ans, et sans s’étonner de n’en jamais obtenir que la même réponse.

C’est un bienfait du ciel que ces retours d’enfance accordés aux âmes passionnées ou poétiques : car il ne faut pas croire que les âmes vulgaires en soient susceptibles ; non, celles-là sont toutes d’une pièce : quand le sérieux de la vie s’en est une fois empare rien ne les ramène aux impressions naïves, aux joies d’enfant, à cette joie qui fait qu’on parle seul, ou qu’on raconte à son chien la cause de sa gaieté subite. Avec quel dédain les esprits forts regardent la personne atteinte de cette bonne extravagance. Ah ! c’est qu’il faut avoir bien souffert pour connaître ces moments où le cœur courbaturé tombe en enfance.



XXIII

LA ROBE VERTE


D’où venait cette charmante perruche si bien élevée ? à qui l’on n’avait appris que trois mots, comme si tous les autres étaient inutiles. La richesse de son collier trahissait