Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/182

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dérangé Lapeyronie inutilement, et prétendit qu’il était tout à fait rétabli de son indisposition : mais Lapeyronie, qui tâtait son pouls, lui donna un de ces démentis de médecins qui ne permettent point de réplique.

— Vous avez beaucoup de fièvre, monsieur le duc ; si vous retournez à Paris dans cet état de spasme, il vous arrivera malheur, je vous le prédis ; je ne conçois pas comment le docteur qui vous soigne vous a laissé sortir.

— Le pauvre homme est bien innocent des folies de son malade, vraiment ; mais je ne souffrirai pas qu’il les recommence, dit M. de Richelieu ; je vais l’établir dans mon appartement au château, et j’espère bien que, grâce à vos soins et à ma sévérité d’oncle, il sera bientôt guéri.

— Voilà une ordonnance que j’approuve, répondit le chirurgien, j’y joins celle d’être au lit dans une demi-heure.

— Soyez tranquille, je l’y mettrai plutôt de force.

— J’aurai l’honneur de me rendre chez M. le duc dans la soirée, après avoir visité M. de Maurepas.

— Eh ! mon Dieu ! qu’a-t-il donc, notre cher ministre ? On prétend qu’il a éprouvé je ne sais quelle révolution qui lui a donné la fièvre.

— C’est une chute qu’il a faite dans la galerie, à ce qu’il m’a dit ; il en est résulté des étouffements, une malaise général, et il m’a fallu le saigner hier soir.

— Ah ! c’est parfait, s’écrie en riant le duc de Richelieu. quoi, vraiment ? il en est malade ?

Et les rires du duc continuèrent, à l’étonnement de tous ceux qui n’en pouvaient comprendre la cause. Parbleu ! mon cher Lapeyronie, il faut que vous me fassiez le plaisir de lui dire combien je prends part à ses souffrances.

— Et à quel point vous en riez, peut-être ? Ah ! monsieur le duc, ce serait le mettre de fort mauvaise humeur, et la médecine nous prescrit d’éviter tout ce qui peut aigrir la bile du malade.

— Croyez-moi, docteur, recommandez-lui de ne pas prendre l’air la nuit, sinon je lui prédis une rechute.

Peu de moments après le départ de Lapeyronie, madame de Chevreuse arriva tout effarée, croyant trouver le duc d’Agénois à moitié mort. Le domestique qu’on avait envoyé a la recherche du docteur, pour le plus grand succès de sa commission, n’avait pas manqué de dire à tous ceux qui se