Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/183

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

trouvaient sur son passage que le duc d’Agénois était à l’agonie chez madame de la Tournelle.

Madame de Tencin, la duchesse de Lesdiguières, vinrent aussi sur le bruit de cette triste nouvelle, et le duc d’Agénois maudit l’intérêt qu’on lui témoignait ; car il avait espéré revoir madame de la Tournelle presque sans témoins : la présence de son oncle, confident de son amour, n’en aurait pas gêné la pure expression ; au lieu de cela, il lui fallut subir l’ennemi d’une contrainte insupportable.

Madame de Lesdiguières, que ses principes avaient éloignée depuis quelque temps de chez madame de la Tournelle, y revenait dans l’espoir de la déterminer, par ses conseils, à faire cesser les bruits nuisibles à sa réputation en épousant le duc d’Agénois ; par une inconséquence assez naturelle aux femmes dont la vertu n’est pas à l’abri des faiblesses de la vanité, la duchesse de Lesdiguières, tout en s’indignant à la seule pensée de voir madame de la Tournelle succéder à la comtesse de Mailly, trouvait fort simple que la première se servit de son crédit sur le cœur du roi, pour faire faire un brillant mariage à mademoiselle de Montcravel.

Le duc d’Agénois se consola de ne pouvoir parler de son amour à madame de la Tournelle, en voyant qu’il était protégé par les personnes dont elle appréciait le plus l’estime ; l’instinct d’une tendresse craintive lui fit deviner qu’il était de son intérêt de laisser madame de Lesdiguières seule avec la marquise : que la duchesse plaiderait sa cause mieux que lui. Alors il se laissa emmener par son oncle. Madame de Chevreuse et madame de Tencin, le voyant beaucoup moins en danger qu’elles ne le croyaient, cessèrent tout à coup leurs démonstrations affectueuses. Elles pressentirent que ce retour, ces dangers, cette blessure, ce courage à tout braver pour revoir madame de la Tournelle, donneraient beaucoup d’humeur au roi ; sans se concerter elles décidèrent de se maintenir assez froidement avec le duc d’Agénois.