Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/230

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let du roi ; elle ne put s’empêcher de sourire en le prenant.

— Je voudrais bien savoir, dit le duc, quel est le chiffre de ce billet-ci ; je lui en ai déjà vu écrire deux pendant le peu de temps que je suis resté dans son cabinet avec d’Argenson et Maurepas.

— C’est le sixième, répondit en riant madame de la Tournelle ; mais celui-là vous concerne particulièrement ; le roi veut que je vous garde à souper, il va venir dans un quart d’heure avec M. de Meuse. Acceptez-vous ?

— J’en meurs d’envie, et pourtant c’est une assez vilaine action de ma part, ordonnez-la-moi, je vous en conjure, cela tranquillisera ma conscience.

— Soit, écrivez là un mot, vous le ferez porter par un de mes gens à l’hôtel de…

— Arrêtez… vous pourriez vous tromper, dit le duc en écrivant.

— Vous serez donc toujours un monstre d’inconstance ? En vérité, quand je pense au mauvais exemple que vous donnez au roi, il me prend envie de vous brouiller avec lui.

— N’allez pas me jouer ce vilain tour ! d’abord, ce serait une grande injustice, car je ne sache rien aujourd’hui qui puisse rendre le roi infidèle ; mais j’oublie qu’il m’a confié la note des articles que je dois faire inscrire sur le contrat de mariage de votre sœur ; il faut que je vous la montre pour que vous sachiez jusqu’où va la générosité du roi.

Et le duc se mit à lire haut les articles suivants écrits de la main de Louis XV.

« Je donne 30,000 livres pour les frais de noce, 80,000 livres en rentes sur les postes, dont moitié sera mise en communauté.

» La pension de dame du palais dès à présent, trente ans de privilége sur les juifs, que je m’engage à renouveler jusqu’en 1800.

» Signé : Louis. »

— Comme le duc de Lauraguais a deux enfants de son premier mariage (avec mademoiselle D. O.), ajouta M. de Richelieu, le roi a lui-même dicté la clause qui assurait ses dons aux seuls héritiers de votre sœur. Vous voyez qu’il pense à tout.