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PORTRAIT

[1]

DE MADAME LA MARQUISE DE MIREPOIX.


La beauté que je chante ignore ses appas ;
Mortels qui la voyez, dites-lui qu’elle est belle,
      Naïve, simple, naturelle,
      Et timide sans embarras.
      Telle est la jacinthe nouvelle,
      Sa tête ne s’élève pas
      Sur les fleurs qui sont autour d’elle ;
      Sans se montrer, sans se cacher,
      Elle se plaît dans la prairie,
      Elle y pourrait cacher sa vie,
      Si l’œil ne venait l’y chercher.

      Mirepoix reçut en partage
      La candeur, la douceur, la paix ;
      Et ce sont, entre mille attraits,
      Ceux dont elle veut faire usage,
   Pour altérer la douceur de ses traits :
      Le fier dédain n’osa jamais
      Se faire voir sur son visage.

      Son esprit a cette chaleur
      Du soleil qui commence à naître :
      L’hymen peut parler de son cœur,
      L’amour pourrait le méconnaître.

— Il sait fort, bien à quoi s’en tenir sur ce point, dit madame de Boufflers à voix basse à M. de Fimarcon, et personne n’est dupe de la supposition.

— Quoi, vous pensez… ?

— Ce que vous pensez aussi, reprit-elle ; mais nos prudes sont ainsi, elles prennent toutes un poêle pour chanter leurs rigueurs. Quand je serai vieille, j’aurai aussi quelque auteur célèbre à ma suite, comme on a un chien pour mordre ses ennemis. Personne alors n’osera plus m’attaquer[2].

Ce petit cours de médisance fut interrompu par M. Du-

  1. Montesquieu, tome VII, n. 17.
  2. On sait que J.-J. Rousseau demeura longtemps chez la maréchale de Luxembourg.