Aller au contenu

Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

je suis descendue dans le jardin pour y prendre l’air ; j’avais à peine fait quelques pas dans une des allées du bois, que j’entendis marcher derrière moi ; je me retournai précipitamment, et vis un homme que l’obscurité m’empêcha de reconnaître : l’idée du vol vint à ma pensée ; j’eus un moment de frayeur qui cessa bien vîte ; le fantôme s’approcha, et je le reconnus pour Frédéric.

— Vous ici ? madame, dit-il en m’abordant ;

— Oui, mon frère, lui répondis-je, je souffre, et j’espérais que l’air me ferait du bien ; mais je vais rentrer, car je n’éprouve aucun soulagement.

— Ah ! par grâce, interrompit-il avec chaleur, ne me donnez jamais ce nom, il m’est odieux.

Puis revenant à lui :

— Pardon, dit-il, je vous offense, j’offense l’être le plus adorable, celui auquel je voudrais consacrer ma vie ; mais il ne dépend pas de moi de lui cacher le sentiment dont il remplit mon âme.

En disant ces mots, il était à mes pieds et allait s’emparer de ma main, lorsque je me retirai brusquement, en lui témoignant combien j’étais blessée d’une conduite aussi indigne de lui et de moi.

— L’heure et le lieu, lui ai-je dit, ne me permettent pas d’entrer avec vous dans une explication que vous auriez dû m’épargner, et dont vous n’aurez plus