Page:Nichault - Le Mari confident.pdf/26

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heur en épousant un petit monstre sans esprit, eh bien, sa bossue en a tout juste assez pour se faire courtiser par un jeune ambitieux qui l’adorera tant qu’elle aura un oncle au ministère.

— Par grâce, cher oncle, n’ajoutez pas à mon effroi conjugal par vos réflexions désolantes. Vous savez tout ce que j’ai tenté pour ôter à mon père l’idée de me marier si tôt ; ne rendez pas mon obéissance plus pénible.

— En vérité, n’es-tu pas bien à plaindre ? tu épouses une fille charmante, riche, bien élevée, que son origine plus que bourgeoise te soumettra comme une négresse est soumise à un blanc dans nos colonies ; une Agnès qui ne connaît pas le monde, à qui tu peux faire accroire tout ce qu’il te plaira tant que tu la garderas dans tes forêts de la Bretagne. Va, je te garantis au moins trois ans de bons. C’est plus que le Ciel n’en accorde à la plupart des maris heureux.

Thomassin avait exigé que la noce se fît le plus discrètement possible, et ne se souciait pas de réunir à cette solennité les rejetons de la noble famille des Bois-Verdun aux humbles parents qui lui restaient ; pourtant il avait employé une assez forte somme à sortir ces derniers de leur condition plus que modeste ; mais en les habillant comme lui,