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L’entrée de madame des Bruyères, dans les salons du Palazzo-Reale, fit sensation. Elle était belle à faire pitié, comme aurait dit le romancier moderne qui a découvert que les agitations du cœur, la fièvre de l’inquiétude, la terreur du pressentiment, embellissaient beaucoup les jolies femmes. Son regard brillant des larmes qu’elle retenait, avait une expression divine ; ses efforts pour dissimuler sa souffrance, animaient son teint, ses gestes ; elle parlait avec vivacité et même avec cette éloquence qui naît des sentiments exaltés et fournit des mots heureux en dépit de la raison. Adalbert se sentait attiré vers elle comme par un charme invincible.

— À la voir si éclatante, si fière des succès qu’elle obtient, pensait-il, on dirait qu’elle devine le sort qui m’attend et la liberté dont elle va jouir. Si elle savait qu’en cet instant je la lègue à mon ami, que je la supplie de lui accorder le bien que j’ai perdu si sottement, le bonheur qui m’eût fait chérir la vie, et dont la perte m’ôte tout désir de la défendre. Ah ! que ne peut-elle lire dans mon cœur, le sien serait moins implacable, il me donnerait un souvenir.

En se parlant ainsi, Adalbert ne se doutait pas de la trace que chacune de ses pensées laissait sur