Page:Nichault - Le Mari confident.pdf/46

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cher de faire sur l’ouvrage, sont autant de professions de foi littéraire, de certificats d’ignorance, ou de connaissance des hommes et de la société, d’indices de froideur ou de sensibilité, de grossièreté ou de délicatesse. Édouard sortit de cette dangereuse épreuve à sa gloire, et madame d’Almédarès félicita franchement Clotilde d’avoir pour ministre de ses finances un homme aussi distingué par ses talents et sa probité, que par ses manières nobles et gracieuses.

Clotilde rendait justice à Édouard, et le remerciait chaque soir de sa complaisance à leur lire ; mais sans cesse préoccupée du même souvenir, elle ne s’intéressait qu’à ce qui l’en rapprochait, soit par la comparaison, soit par la différence. Elle interrompait souvent le lecteur par des acclamations singulières, et qu’elle se refusait à expliquer. La marquise et M. Fresneval se regardaient alors comme pour se demander s’ils la comprenaient ; il se faisait un moment de silence, dont Clotilde ne s’apercevait même pas, tant elle était absorbée dans sa rêverie ; puis Édouard continuait sa lecture d’une voix oppressée, avec l’esprit distrait et des intonations monotones qui prouvaient que son obstination à lire ailleurs le captivait tout entier.