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AU PAYS DE L’AMOUR BLEU

C’est un corps souple, aux muscles vigoureux
Même si votre cervelle sonne creux
Comme un coffret vide
Elle aimera votre poitrine rude
Pour y appuyer sa tête lasse
Après le plaisir.

Le violon, de sa note unique, souligne ces paroles de défi. Qui les relèvera ?

La musique se fait énervante, sensuelle. Une femme, s’est approchée d’un homme. Ses cheveux tressés semblent des serpents noirs.

Les yeux brillent.

Une voix mâle et chaude monte dans le silence.

Tu peux exiger de nous ce que tu veux,
Car tu es, Tahia,
Assise au milieu des autres femmes,
Comme un méhari de Iguedalem entre les méhara,
Comme un plant de vigne parmi les tamaris,
Comme une tunique de Ghati entre d’autres tuniques,
Comme la lune entre les étoiles,
Comme les javelots entre les lances fichées à terre.

Un souffle de volupté a passé sur l’ahal.

Tahia reprend, avec plus de douceur rauque, à celui qui vient d’improviser pour elle sur des airs anciens, celui qu’en ce moment Marie-Ange regarde avec ferveur :

Pourquoi sera-ce toi, plutôt qu’un autre ?
Je ne sais.
Cependant celui que j’aimerai ce soir
Sera le premier
Et lorsque mes doigts soulèveront le voile
Sur ses lèvres
L’amour nous enfermera ensemble
Comme le sable ensevelit le désert.