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LA LOI DU SUD

Le brigadier Séguin, qui se savait bel homme dans l’uniforme des spahis, secoua la porte avec impatience.

— Est-ce bientôt fini, là-dedans ?

Aussitôt, une voix de femme répondit affirmativement ; cependant, il eut encore le temps de fumer une cigarette avant que l’Ouled-Naïl apparût, menue et guindée, telle une infante, dans sa vaste robe d’argent. Elle salua sans que le sourire facile des courtisanes vint à ses lèvres ; son regard s’adoucit quand l’homme qui venait de l’étreindre, quitta, à son tour, la petite chambre.

Déjà tout occupé de sa compagne, dont il ceinturait la taille d’un geste sans équivoque, Séguin ne prêta aucune attention à l’Arabe qui descendait la pente de Nezla, quartier des amours, d’un pas souple et allongé. Un chèche blanc entourait son visage fin et bronzé, un burnous, jeté négligemment, par habitude, sur ses épaules, élargissait sa silhouette sans l’alourdir, tant elle était harmonieusement proportionnée. Traversant Touggourt encore éclairée, il s’éloigna vers Djâama, et quitta bientôt la route pour le reg. Sous ses pas, le sable devenait de plus en plus fluide. Au loin, des petites dunes précisèrent leur vallonnement arrondi, dans l’ombre. Il devina les tentes de son campement à cet impondérable qui révèle la vie, à cette impalpable odeur de bois calciné qui frémissait dans l’air d’une indéfinissable pureté.

Il s’était attardé longtemps auprès de Chiffa. Plus longtemps que d’habitude. La jeunesse de l’Ouled-Naïl, son charme étrange, son corps dansant, sa soumission, le garrottaient davantage à chaque rencontre.