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LA LOI DU SUD

Si El Achmi, le grand chef nomade des Chambaa, se mariait. Il sortit de sa maison pour accueillir ses hôtes.

Le grand patio était couvert de riches tapis sur lesquels les arrivants prirent place. Des salves déchirèrent le silence.

— L’heure approche, disait Messaouda, la vieille esclave qui aidait Talhia à mettre sa robe d’épouse.

— Comment est-il ? questionna la jeune fille.

Comme le veut la coutume, elle n’avait jamais vu son fiancé.

— Il est riche et fort et saura protéger ta faiblesse.

— Est-il jeune ? Est-il beau ? L’aimerais-je au premier regard ?

— Une épouse aime toujours l’époux choisi par les siens.

— Tu parles comme un livre, Messaouda… Mais tu ne m’apprends rien cependant…

Talhia ramena son voile sur son visage et sortit à la rencontre de l’époux. Au premier regard, elle pâlit. On lui avait menti. Son époux était vieux, laid, sec comme un arbre sans sève.

Elle sut qu’elle ne l’aimerait jamais et qu’il lui faudrait feindre. Mais elle se soumit, comme s’étaient soumises toutes les femmes de sa race avant elle.

Et ce furent des jours, et des jours où elle restait dans un bassour, balancée rudement au pas sec des méhara de la caravane. Elle soupirait. Il lui déplaisait d’être enclose dans cette litière inconfortable. Comme elle aurait aimé être libre, respirer à pleins poumons l’air vivifiant du désert.

Et ce furent des nuits et des nuits où son maître venait la rejoindre.

Ce soir, à cause de son hôte, il tardait.

Talhia interroge l’esclave :