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LA MORT FAIT LE TROTTOIR

— Ne t’inquiète pas. Tu trouveras bien quelque chose. Tiens, je vais téléphoner à Tadul ; il est au Casino Montparnasse. C’est un vieux copain. Il te dégotera un coin de programme.

— Tu es chic, Liliane. Il n’est pas mauvais mon numéro, tu sais.

Elle n’était pas jolie, avec son nez relevé et sa bouche trop grande, mais elle avait une bonne figure candide. Elle engloutissait tout ce qui se trouvait devant elle. Liliane au contraire avait à peine mangé. Elle avait allumé une cigarette et tout en fumant s’habillait.

— Je peux emporter le pain qui reste ? dit l’acrobate en se levant. Ça me fera toujours mon dîner de ce soir.

— Bien sûr, répondit Liliane. Et compte sur moi. Je téléphone dès aujourd’hui.

— Merci.

La contorsionniste s’en fut cette fois sur ses pieds, comme tout le monde.

— Pauvre gosse, fit Liliane. Je ne sais pas comment elle fait son compte. Elle ne bouffe pas tous les jours et elle ne maigrit pas… Tu vois, Ruby, c’est ça aussi la vie d’artiste.

Elle s’apprêtait à passer sa robe, mais elle s’immobilisa soudain, la figure illuminée de joie. Un pas d’homme se faisait entendre dans l’escalier.

— C’est Tonio… mon mari. Tu ne le connais pas ?

— Non, fit Ruby.