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VIE DU BIENHEUREUX

défaut de Pierre, si c’en est un, était un excès de sensibilité qui produisait quelquefois chez lui des saillies d’humeur ou des moments de tristesse inaccoutumée. Voyait-il réprimander l’un de ses frères ou l’une de ses sœurs ? il perdait soudain sa gaité habituelle. Le front baisse, il se tenait à l’écart et souffrait en silence jusqu’à ce que l’orage fut dissipe. Entendait-il une plainte, voyait-il couler quelques larmes, c’en était assez pour qu’il fut vivement affecte. Des avertissements, même sévères, lui firent comprendre qu’une telle compassion était déplacée, et qu’il devait la comprimer. C’était le faire lutter centre son propre cœur, et ce n’est pas sans peine qu’il parvient à vaincre un défaut qui n’était, après tout, que l’excès d’une qualité assez rare chez les enfants, cet âge sans pitié.

II

Dans les familles nombreuses et peu favorisées de la fortune, les enfants sont, de bonne heure, mis au travail. Pierre fut chargé, dès l’âge de sept ans, de garder le petit troupeau de son père. Devenu prêtre, il aimait à rappeler sa vie de berger. Dans un moment d’épanchement il disait à un ami : « Il fallait se lever de grand matin… Ma mère (elle était si pieuse et si bonne !) ne manquait jamais de me demander, avant mon départ, si j’avais fait ma prière… Je l’embrassais comme pour recevoir sa bénédiction… Elle me passait au bras un petit panier dans lequel elle avait eu