Page:Nietzsche - Aurore.djvu/224

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
224
AURORE

écoles supérieures et inférieures ; il n’y a pas encore d’associations silencieuses de ceux qui se sont engagés à renoncer à l’aide des tribunaux, à punir ceux qui leur ont fait du mal et à se venger sur eux ; nul penseur n’a encore eu le courage de mesurer la santé d’une société et des individus qui la composent d’après le nombre des parasites qu’elle peut supporter ; nul homme d’État ne s’est encore trouvé qui menât sa charrue dans l’esprit de ces discours généreux et doux : « Si tu veux cultiver la terre, cultive-la avec la charrue : alors jouiront de toi l’oiseau et le loup qui vont derrière ta charrue, — toutes les créatures jouiront de toi. »

203.

Contre le mauvais régime. — Fi des repas que font maintenant les hommes, tant dans les restaurants que dans tous les endroits où vit la classe aisée de la société ! Lors même que se réunissent des savants considérés ce sont des coutumes semblables qui chargent leur table, tout comme celle des banquiers : selon le principe de la trop grande abondance et de la multiplicité, — d’où il suit que les mets sont préparés en vue de l’effet et non en vue des conséquences et qu’il faut que des boissons excitantes aident à chasser la lourdeur de l’estomac et du cerveau. Fi de la dissolution et de la sensibilité exagérée que tout cela doit amener à la suite ! Fi des rêves qui viendront à ces gens-là ! Fi des arts et des livres qui seront le dessert de pareils repas ! Et qu’ils agissent comme ils voudront,