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AURORE

maintenant il aspire à trouver des choses qu’il lui est absolument impossible de transmuer en or. Et avec quelle violence il se met à désirer ! Comme quelqu’un qui meurt de faim aspire à la nourriture ! — De quoi s’emparera-t-il ?

487.

Honte. — Voici le beau coursier qui piaffe et hennit, il est impatient de la course et aime celui qui le monte habituellement, — mais, ô honte ! le cavalier ne parvient pas à monter en selle, il est fatigué. — C’est là la honte du penseur fatigué devant sa propre philosophie.

488.

Contre la prodigalité en amour. — Ne rougissons-nous pas lorsque nous nous surprenons en flagrant délit d’une aversion violente ? Mais nous devrions rougir également de nos sympathies violentes, à cause de l’injustice qu’il y a aussi en elles. Plus encore : il y a des hommes dont le cœur se serre et qui se sentent comme à l’étroit lorsque quelqu’un ne leur prodigue sa sympathie qu’en en retirant une part aux autres. Lorsqu’ils entendent à la voix que c’est eux que l’on choisit, préfère ! Hélas ! je ne suis pas reconnaissant pour ce genre de choix, je m’aperçois que j’en veux à celui qui veut me distinguer ainsi : il ne doit pas m’aimer aux dépens des autres ! J’ai déjà de la peine à me contenir moi-même ! Et souvent encore mon cœur déborde et il y a des raisons à ma pétulance. — À quelqu’un qui possède cela il ne faut pas apporter ce qui, à