Page:Nietzsche - Considérations inactuelles, I.djvu/102

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artistique et d’autre part que la joie qu’il appelle « innocente » n’est rien moins qu’innocente, vu qu’elle a miné peu à peu une nature de véritable savant et de critique, c’est-à-dire le génie véritable de Strauss, pour finir par le détruire complètement. À vrai dire Strauss, dans un accès de franchise extrême, ajoute lui-même qu’il a toujours « porté en lui un Merck qui ne cessait de lui dire : ne continue pas à écrire un pareil fatras, c’est là affaire des autres ! » C’était la voix du véritable génie de Strauss, la même qui lui dit aussi quelle est la valeur de son Testament, innocent et court-vêtu, du philistin moderne. D’autres en sont capables et beaucoup feraient mieux. Et ceux qui en seraient le plus capables, des esprits plus doués et plus riches que Strauss, n’auraient encore fait que du — fatras.

Je pense que l’on a bien compris à quel point j’estime l’écrivain Strauss : comme un comédien qui joue le génie naïf et le classique. Si Lichtenberg a pu dire un jour : « la manière simple doit être recommandée, ne fût-ce que pour cette raison qu’aucun honnête homme ne fignole ni ne raffine ses expressions », cela ne démontre pas encore que la manière simple est une preuve de probité littéraire. Je souhaiterais que l’écrivain Strauss fût plus honnête, car alors il écrirait mieux et il serait