quoi l’on peut se rappeler ce vers : « Les étoiles,
on ne les désire pas[1] »). Mais abstraction faite de
ces suggestions de notre vanité, l’activité du génie
ne paraît pas le moins du monde quelque chose de
foncièrement différent de l’activité de l’inventeur en
mécanique, du savant astronome ou historien, du
maître en tactique. Toutes ces activités s’expliquent
si l’on se représente des hommes dont la pensée
est active dans une direction unique, qui utilisent
tout comme matière première, qui ne cessent d’observer
diligemment leur vie intérieure et celle d’autrui,
qui ne se lassent pas de combiner leurs moyens.
Le génie ne fait rien que d’apprendre d’abord à
poser des pierres, ensuite à bâtir, que de chercher
toujours des matériaux et de travailler toujours à
y mettre la forme. Toute activité de l’homme est
compliquée à miracle, non pas seulement celle du
génie : mais aucune n’est un « miracle ». —
D’où vient donc cette croyance qu’il n’y a de
génie que chez l’artiste, l’orateur et le philosophe ?
qu’eux seuls ont une « intuition » ? (mot par lequel
on leur attribue une sorte de lorgnette merveilleuse
avec laquelle ils voient directement dans l’« être » !)
Les hommes ne parlent intentionnellement de génie
que là où les effets de la grande intelligence leur
- ↑ Allusion aux vers de Gœthe :
- Die Sterne, die begehrt man nicht,
- Man freut sich ihrer Pracht.