Qui a une fois écrit et sent en lui la passion d’écrire
n’apprend presque de tout ce qu’il fait et vit
que ce qui est littérairement communicabale. Il ne
pense plus à lui, mais à l’écrivain et à son public :
il veut la compréhension, mais non pour son propre
usage. Celui qui enseigne est la plupart du temps
incapable de mener quelque tâche propre pour son
propre bien, il pense toujours au bien de ses élèves,
et toute connaissance ne lui donne de plaisir qu’autant
qu’il peut l’enseigner. Il finit par se considérer
comme un passage du savoir, et en somme
comme un moyen, au point qu’il a perdu le sérieux
en ce qui le concerne.
Les mauvais écrivains nécessaires. — Il faudra toujours qu’il y ait de mauvais écrivains, car ils répondent au goût des âges non développés, non mûris ; ceux-ci ont leurs besoins aussi bien que les plus mûrs. Si la vie humaine était plus longue, le nombre des individus venus à maturité serait supérieur ou du moins égal à celui des individus non mûrs ; mais ainsi la très grande majorité meurt trop jeune, c’est-à-dire qu’il y a toujours beaucoup plus d’intelligences non développées ayant mauvais goût. Celles-ci désirent en outre avec la grande véhémence de la jeunesse la satisfaction de leur besoin : et ainsi elles se procurent de force de mauvais auteurs.