Aller au contenu

Page:Nietzsche - Humain, trop humain (2ème partie).djvu/96

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
96
HUMAIN, TROP HUMAIN, DEUXIÈME PARTIE



157.

La critique la plus violente. — On critique le plus violemment un homme, une œuvre, lorsque l’on en dessine l’idéal.

158.

Peu et sans amour. — Tout bon livre est écrit pour son espèce et c’est pourquoi tous les autres lecteurs, c’est-à-dire le plusgrand nombre, l’accueillent fort mal ; sa réputation repose sur une base étroite et ne peut être édifiée que lentement. Le livre médiocre et mauvais l’est tout bonnement parce qu’il cherche à plaire au grand nombre et qu’il lui plaît.

159.

Musique et maladie. — Le danger de la musique nouvelle, c’est qu’elle nous présente la coupe des délices et du sublime avec un geste si captivant et avec une telle apparence d’extase morale que le plus modéré et le plus noble finit toujours par en absorber quelques gouttes de trop. Mais cette minime débauche, répétée à l’infini, peut amener finalement une altération de la santé intellectuelle plus profondeque celle qui résulterait des excès les plus grossiers : en sorte qu’un jour il ne restera plus autre chose à faire qu’à fuir la grotte des nymphes, pour retourner, à travers les flots et les dangers, vers l’ivresse d’Ithaque et les baisers de l’épouse, plus simple et plus humaine — bref de retourner au foyer