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Six mois après, Lucien de Sauvetat revenu en Gascogne, épousait Blanche d’Auvray et amenait dans la maison de sa jeune femme une orpheline qu’il disait lui avoir été confiée à New-York, par un de ses amis d’enfance.

On ne savait pas l’âge de cette enfant, admirablement accueillie par madame de Sauvetat et encore mieux par madame d’Auvray.

Elle était déjà très belle, et quoique sa taille élevée, sa physionomie sérieuse, ses traits d’une régularité parfaite eussent pu lui faire donner de dix-sept à dix-huit ans, la délicatesse extrême de toute sa personne, son cou mince et souple comme la tige d’une fleur, ses yeux brillants dont la large prunelle de velours flottait dans un blanc encore bleu, un je ne sais quoi de timide, d’étonné et de naïf, disaient qu’elle sortait à peine de l’enfance.

Son rôle dans la maison, d’abord mal défini, était pourtant celui d’une fille d’adoption.

Peu à peu, cependant, et presque chaque jour, il prit certaines proportions, grâce à madame d’Auvray qui lui témoignait une amitié excessive.

Se sentant mourir, cette dernière donna à Marianne une autorité souveraine sur les domestiques et dans le ménage, autorité que madame de Sauvetat ne songea jamais à discuter.

La jeune fille prit donc les rênes de l’administration intérieure, et lorsque Marguerite, le petit ange que madame d’Auvray n’avait pas béni, fut enlevé à sa nourrice, nul ne fut surpris de voir l’orpheline exclusivement chargée du bébé.

Elle s’acquittait du reste de sa tâche d’une manière parfaite, et la plus grande union régnait alors dans la famille.