Page:Noailles - L’Ombre des jours, 1902.djvu/52

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Ceux qui veillaient, penchés sur les savants secrets
Et ne relevaient pas le front de sur la table,
S’attarderont le soir dans l’air glissant et frais,
Et viendront boire au creux de l’été délectable.

L’invisible bacchante et le sylvain pampré
De leurs rapides mains leur presseront les tempes,
Ivres du vin d’odeur qui flotte sur le pré,
Ils n’apercevront pas le dieu qui rôde et rampe.

Le subtil dieu d’erreur et de tentation
Qui vient troubler le goût de l’heure familière,
Qui mène la colère et la crispation
Et qui s’enroule autour du désir comme un lierre.

Le dieu qui dit : « Voici l’ombre, le pré, le val,
La source, la colline et les ombelles rondes,
Qu’est-ce que tout cela qui ne te fait pas mal,
Toute joie est nouée à la douleur du monde