Page:Noailles - La Nouvelle Espérance, 1903.djvu/12

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le bras de Sabine, et, sagement, elle dit que oui, qu’elle comprenait ; qu’on vivait pour la culture patiente et fervente de l’esprit et de la conscience ; que, pour elle, ayant asservi à une règle sévère ses désirs de connaître, elle goûtait les parfaites satisfactions de la lecture et de la peinture.

— Je crois, disait-elle, – et ses paupières battaient timidement comme si elles eussent voulu cacher son âme apparue dans ses yeux clairs, – je crois que la douceur et le devoir sont le vrai bonheur. Il me semble que ce que je fais n’est pas seulement ma tâche isolée, mais entre dans le mouvement d’une grande horloge d’ordre et de labeur… J’ai l’impression quand j’étudie, avec ce tablier de toile dont tu ris, que je suis comme le moine dans sa cellule, qu’il y a sans que je les voie d’autres moines dans d’autres cellules, et que nous sommes, comme cela, tout un couvent dans le monde, de travailleurs heureux et qui n’ont pas de vanité.

— Mais l’air, le plaisir, dit Sabine, la tristesse prise au moment où on la veut, la flânerie avec ses beaux projets sourds et sombres, le rire