Page:Noailles - La Nouvelle Espérance, 1903.djvu/14

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un gris d’argent, couronné de feuillage rouge, laissant pendre autour d’elle son manteau de laine molle, ressemblait à ces statues de Pomone ou de Flore que rien n’habille complètement, ni le lierre, ni le givre ; qui, dans la bise, gardent leur figure d’été ; et son visage, désordonné par l’éclat des yeux, s’échappait des vêtements, irritable et nu.

En suivant le chemin qui menait à leur demeure, elles entendirent la musique d’un orgue de barbarie dont les sons cassés s’égrenaient, comme tombés d’un clavier de fer et de verre.

On ne voyait pas le joueur et l’orgue qui devaient se trouver dans une petite rue voisine ; mais l’impression était si vive que Sabine évoqua tout de suite, avec la précision d’une image découpée et collée sur le ciel de fumée jaune, le mendiant dans l’ombre d’une porte, sa caisse de bois noir avec le morceau de toile rouge cloué au dos, et la petite sébile posée dessus.

Et la musique trébuchait, mendiante et misérable, point voluptueuse, malgré les mélodies retenues des chansons de l’été ; musique faible