Page:Noailles - La Nouvelle Espérance, 1903.djvu/37

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le jeune homme, mais Jérôme Hérelle ne cédait pas et trouvait un prétexte à s’en aller courtoisement.

Cette fois-ci, il se résigna.

Il prit une cigarette, l’alluma, la déposa sur le bois du piano et joua.

On se taisait autour de lui, chacun cherchant la pose confortable de la langueur et de la rêverie.

Henri, qui n’aimait pas la musique, prenait un livre, lisait, ne se sentait pas troublé par les sons, dont la chambre s’emplissait comme d’un encens et d’une religion subtile.

Jérôme, en ce moment, jouait et chantait, le visage un peu levé, cherchant à se souvenir des paroles qu’il ne se rappelait pas bien. Les mains hésitantes, traînant sur le clavier, il chantait une admirable mélodie de Fauré.

La figure pâle, sous les cheveux d’un blond sombre à petites secousses d’or, s’émouvait d’une fine exaltation.

Il chantait, et la musique, mêlée aux mots, s’épanouissait, sensuelle et rose, comme une fleur née du sang.

Il chantait, et c’était comme une déchirure légère