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LA DOMINATION

Mille pigeons, sur les dalles lisses et chaudes de la place, roucoulent, font un tapis de plumes, de soupirs et d’amour.

— Donna Marie, — s’écrie Antoine Arnault, en pensant à la comtesse Albi, qu’il ira voir dans la journée, — vous vivez ici et votre cœur reste chaste ! Je vous méprise et je vous plains.

Dans la journée il se fait conduire au palais de la comtesse. Ce palais, si beau sur les eaux du canal, avec ses belles vitres, éclairées, semble-t-il, d’un noir soleil intérieur, porte aimablement sur son marbre orgueilleux le printemps vivant, un léger feuillage. La fraîche humidité des salles, leur grave silence, les tentures rouges et jaunes, toute l’ancienne pompe vénitienne émeuvent Antoine Arnault.

Et voici la jeune femme qui se lève et sourit, aimable et secrète, comme elle était déjà.