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LA DOMINATION

yeux bombés, sa terne douce fourrure, ses hautes oreilles, autant que mon cœur goûtent et retiennent le vent délicieux, le buisson vert et mouvant, la lointaine ligne des collines, la mouche désorientée, qui roule sur un rayon d’air…

» J’aime la vie, Antoine, je l’aime tristement, comme une sœur penchée sur son frère mort. Et en effet, Antoine, mes dieux sont morts. En vain au travers du feuillage je les cherche et les voudrais ranimer ! Ô mes dieux bleus et forts, qui faisiez vivant le tronc du bouleau, qui couliez dans la source claire, qui fûtes vous-mêmes la forêt, si bien que la jeune fille, écartant les branches du saule, entrait dans vos bras passionnés ! Quel écho d’amour demeure dans ces espaces où vos voix se sont tues ! Amoureuse des ombres, dois-je lever les mains vers un azur désert ?

» Ô Pan, reviens dans le bois parfumé,