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LA DOMINATION

avait sa place près de la fenêtre ; autour de lui, ses deux filles aînées, mariées et maussades, veillaient au bon ordre de la maison ; les deux gendres, dont l’un était officier et l’autre avocat, paraissaient goûter à la gloire de leur beau-père avec cet entrain et cette vulgarité des gens qui font enfin, régulièrement, une bonne chère dont ils n’avaient pas l’usage.

La plus jeune fille du maître, qui s’appelait Corinne, et qui, âgée de dix-huit ans, était d’une beauté charmante, retenait les regards d’Antoine Arnault, lequel pourtant désespérait d’entendre sa voix ou de la voir sourire, tant elle était sage, furtive et modérée.

Aussi, privé du plaisir qu’il eût eu à s’entretenir avec elle, Antoine Arnault reportait avec amertume son attention sur le petit groupe qui formait l’entourage de l’homme illustre. Il y avait là des camarades de sa jeunesse, âgés d’une cinquantaine d’années.