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LES POÈTES ROMANTIQUES


De quoi souffriez-vous ? D’éphémère beauté,
D’un jour plein de langueur qui s’éloigne et qui sombre,
D’un triste chant d’oiseau, et de l’inanité
D’être un pauvre œil humain sous les astres sans nombre !

De quoi souffriez-vous ? De rêve sensuel
Qui veut tout conserver de ce dont il s’empare ;
Et, lorsque la Nature est à chacun avare,
De pouvoir tout aimer pour un temps éternel !

Hélas ! Je connais bien ces tendresses mortelles,
Cet appel au Destin, qui ne peut pas surseoir.
Je connais bien ce cri brisant de l’hirondelle,
Comme une flèche oblique ancrée au cœur du soir.

Je connais ces remous de parfums, de lumière,
Qui font du crépuscule un cap tiède et houleux
Où le cœur, faible esquif noyé par le flot bleu,
S’enfonce, en s’entr’ouvrant, dans l’ombre aventurière.

— Lamartine, Rousseau, Byron, Chateaubriand,
Écouteurs des forêts, des astres, des tempêtes,
Grands oiseaux encagés, et qui heurtiez vos têtes
Aux soleilleux barreaux du suave Orient,