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LAMENTATION


Rien ne peut plus cacher à nos regards lucides,
À notre effroi hanté, figé,
Le vide de l’azur et l’empire du vide
Où tout vient fondre et déroger !

— Le vent tiède, les bois, les astres clairs, la lune,
Ce noble arrangement du soir indifférent,
Qui pourtant séduisait les âmes une à une,
Par un doux aspect triste et franc ;

Les villes, les maisons, toute la fourmilière
Humaine qui se meut,
Et s’endort confiante, en baissant ses lumières.
Le front sur les genoux des dieux.

Tout me semble néant, à tel point s’interpose
La mort entre la vie et moi.
Je ne vous verrai plus, abeilles sur les roses.
Vertes pointes des jeunes mois !

Subit éclatement du printemps qui s’arrache
À des liens serrés, obscurs !
J’aurai les yeux rivés à l’invisible tache
Que fait la douleur sur l’azur.