Aller au contenu

Page:Noailles - Les Vivants et les Morts, 1913.djvu/32

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
32
on ne peut rien vouloir…


« Vous qui rêviez la nuit comme un palmier d’Afrique
« À qui le vaste ciel arrache des parfums,
« Vous avez souhaité cet humble amour unique
« Où les pleurs consolés tarissent un à un !

« Vous avez souhaité la tendresse peureuse,
« L’élan et la stupeur de l’antique animal ;
« On n’est pas à la fois enivrée et heureuse,
« L’univers dans vos bras n’aura pas de rival ;

« Comme le Sahara suffoqué par le sable
« Vous brûlerez en vain, sans qu’un limpide amour
« Verse à votre chaleur son torrent respirable,
« Et vous donne la paix que vous fuiriez toujours… »

— Et, tandis que j’entends cette voix forte et brève,
Je regarde vos mains, en qui j’ai fait tenir
Le flambeau, la moisson, l’évangile et le glaive,
Tout ce qui peut tuer, tout ce qui peut bénir.

Je regarde votre humble et délicat visage
Par qui j’ai voyagé, vogué, chanté, souffert,
Car tous les continents et tous les paysages
Faisaient de votre front mon sensible univers.