Page:Noailles - Les innocentes, ou La sagesse des femmes, 1923.djvu/217

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d’étoiles, tout suscite et enjôle la rêverie des sens.

Avec l’abbé de T***, la conversation, quelque varié qu’en fût l’objet, devenait nette, délimitée, sans halo. Il ne craignait point d’aborder, en particulier surtout, le sujet des passions. Résolu comme un médecin qui renseigne pour préserver, il y insistait au contraire, traitant de l’âme avec une connaissance fine et brutale, car ce confesseur savait bien que le poison de l’amour est dans l’âme, que c’est ainsi qu’il règne sur le monde, ennoblit jusqu’au sublime le barbare et primitif attrait, et par là même offense le Dieu jaloux.

Le silence et la couleur du soir sont plus saisissants qu’ailleurs dans ces climats du sud, animés tout le jour par la plus active lumière. Privée du tumultueux épanchement du soleil, la petite ville de Sorrente, avec sa population paysanne, s’endort tôt, d’un sommeil animal. Tout ce qui veille ensuite est comme dépaysé et frappé d’engourdissement. Mes hôtes, leurs convives et moi ne prolongions guère notre réunion d’après-dîner ; elle prenait fin, d’ordinaire, sur une courte promenade dans le jardin déformé par les ténèbres, obstrué d’arômes, et peu à peu possédé par ce frémissement pudique et voluptueux auquel il