Page:Noailles - Les innocentes, ou La sagesse des femmes, 1923.djvu/228

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dans leur vanité et offensés dans leurs rigoureux principes. Il n’est pas rare de voir que les familles et le proche entourage donnent soudain libre cours, dans les catastrophes du foyer, à ces inimitiés secrètes, ces forces ignorées, instinctives et sans contrôle que les relations journalières engourdissent ou dissimulent. Dès que l’on dispute, sauf entre quelques âmes élues, hélas, qui s’aime encore ? qui se comprend ? qui se ménage ? qui s’estime ?

L’indulgence, aboutissement noble et logique de tout raisonnement, et qui devrait servir de base à nos rapports avec nos frères, l’indulgence, spontanée ou réfléchie, est inconnue de certains cœurs. Bien plus, elle est en horreur à tels esprits qui se croient plus vertueux, à moins qu’ils ne soient davantage hypocrites et dédaigneux de l’équité.

Il m’est arrivé de constater, - affirma tristement l’abbé de T*** - que la douleur d’un des membres d’une famille excitait les autres à le persécuter presque inconsciemment. Je ne sais quelle antique coutume, quel cruel instinct de chasse à courre conduit souvent les individus les plus affinés, comme les plus sommaires, à poursuivre la victime harassée et demi-rendue, et à la menacer de plus près dès