Page:Noailles - Les innocentes, ou La sagesse des femmes, 1923.djvu/8

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tristesse et confusion, et nous fûmes comme ceux qui vont mourir, qui se confessent tout l’un à l’autre en silence, s’emparent spirituellement l’un de l’autre, et par anticipation se sont tout avoué et tout pardonné.

Et c’est en effet un grand aveu et un grand pardon d’être seuls ensemble, avec l’intention du bonheur, dans une chambre secrète, fermée comme un tombeau. Fut-ce une minute heureuse ? Je ne sais, nul mot ne peut convenir, mais il y a de la majesté, et du désarroi sacré, et un calme funèbre aussi, dans ces deux voix qui se parlent dignement encore, alors que l’âme ne peut ignorer ce qu’il adviendra. Tu avais ajouté une goutte de parfum de fleur à ta personne, et tandis que cet arome de jardin montait vers moi comme un fin rayon d’odeur satisfaisante, je m’attendrissais à l’idée que tu avais cru pouvoir te parachever, te surcharger de meilleur, t’environner de quelque agrément encore, toi si complet pour moi, si mystérieusement trop bien, et dont un seul des cils brillants me transperce ardemment comme la flèche plantée au cœur des saintes andalouses.

Et puis, après cette stupeur muette, embarrassée, balbutiante, tout nous devint naturel ; nous fûmes à l’aise et comme sans émotion ; nous organisions de reposer côte à côte et de