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FIN DE SIÈCLE

celle-ci est pour cette raison proportionnellement plus considérable que jadis, et augmente continuellement. Avec la croissance des grandes villes s’augmente parallèlement le nombre des dégénérés de toute espèce, des criminels, des fous et des « dégénérés supérieurs « de Magnan, et il est naturel que ces derniers jouent dans la vie intellectuelle un rôle toujours plus en vue, qu’ils s’efforcent d’introduire dans l’art et la littérature toujours plus d’éléments de folie. L’énorme accroissement de l’hystérie, à notre époque, est dû en partie aux mêmes causes que la dégénérescence ; il y a en outre une cause beaucoup plus générale encore que la croissance des grandes villes, cause qui ne suffit peut-être pas à elle seule à amener la dégénérescence, mais qui est à coup sûr pleinement suffisante pour produire l’hystérie et la neurasthénie. Cette cause est la fatigue de la génération actuelle. Que l’hystérie soit en réalité une conséquence de la fatigue, c’est ce que Féré a démontré par des expériences probantes. Dans une communication à la Société de biologie de Paris, ce très distingué savant s’exprime ainsi : « J’ai observé récemment un certain nombre de faits qui mettent en évidence l’analogie qui existe entre la fatigue et la condition permanente des hystériques. On sait que chez les hystériques la symétrie des mouvements se manifeste d’une manière très caractéristique dans de nombreuses circonstances. J’ai constaté que chez les sujets normaux cette même symétrie des mouvements se retrouvait sous l’influence de la fatigue. Un phénomène qui se montre bien marqué chez les grands hystériques, c’est cette excitabilité particulière qui fait que l’on voit, sous l’influence d’excitations périphériques ou de représen-