Page:Normand - Le Laurier sanglant, 1916.djvu/62

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L’aspect sévère, empreint d’une majesté sombre
Du plateau dénudé qui s’estompait dans l’ombre ;
La maison d’ambulance, en dépit des drapeaux,
Trouée en vingt endroits ; nos abris en lambeaux ;
Le soleil, se couchant derrière les collines,
De ses rayons dorés colorant les ruines ;
Les arbres dénudés, balancés par le vent
Qui sifflait tristement, rapide, en soulevant
Aux crêtes des fossés la neige par rafales ;
Nous tous enfin, debout, tristes, graves et pâles,
La main sur le fusil, sac au dos, regardant
À l’horizon rougi mourir le disque ardent
Et par gradation décroître la lumière…
À la nuit on partit ; mais sous la froide terre,
Le désespoir au cœur, je laissais un ami
Défiguré, sanglant, pour toujours endormi…