Page:Notice historique sur les ouvrages et la vie de Cuvier.djvu/121

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gence ordinaire, dans les réflexions qu’il fait à chaque page sur la nature des animaux, sur leur instinct varié, sur l’influence des causes qui ont pu modifier leurs formes et sur la critique des espèces et leur synonymie, on jugera que la passion si précoce du jeune Cuvier pour le Pline français était la marque la plus évidente du génie qui l’animait.

Mais Buffon, qui l’avait souvent distrait à Montbéliard de ses premières études, qu’il portait même au sermon, lorsqu’il n’était encore qu’enfant, à ce que raconte un témoin oculaire, partagea bientôt son empire sur l’esprit du jeune Cuvier, avec Linné, son rival de gloire, dont les ouvrages plus classiques étaient suivis en partie à Stuttgart dans les différens enseignemens de l’histoire naturelle.

J’ai lieu de présumer que ce fut par la botanique que le jeune Cuvier fit connaissance avec le naturaliste suédois.

Le professeur Kerner, qui était chargé de cet enseignement, dans lequel il suivait le système sexuel, déclare dans la préface de sa Flore des environs de Stuttgart, écrite en Mai 1786 : « Qu’il trouve juste d’adresser publiquement ses vifs remercîmens à M. le chevalier de Marschall et à M. Cuvier, qui se distinguent parmi tous les élèves de la haute école Caroline, par leurs connaissances botaniques, pour avoir découvert, pendant qu’on imprimait cette Flore, plusieurs espèces de plantes, que l’auteur ne savait pas exister dans les environs, entre autres une nouvelle espèce de potentilla et l’avena sesquitertia, Linn. »

Il y avait précisément deux années que le jeune Cuvier habitait Stuttgart ; il y était arrivé, comme on l’a vu, sans aucune connaissance de la langue allemande, et cependant il s’était déjà mis à la tête des nombreux élèves de cette académie, par la science qu’il y avait acquise en botanique.

À cette époque, il n’était pas encore chevalier.[1] Ce fut après les


  1. Il y avait deux ordres académiques, qui, outre les prix, qui consistaient en médailles d’argent, contribuaient à exciter l’émulation des élèves de l’Académie. L’un, appelé le petit ordre, était une croix d’or à huit pointes, émaillée de brun, attachée à la troisième boutonnière du côté gauche, avec un ruban jaune, liséré de rouge. Pour la mériter, l’élève devait avoir remporté, dans les examens d’une même année, quatre prix dans la philosophie ou dans les sciences de destination (spéciales) ; l’autre, qu’on nommait le grand ordre, n’était accordé qu’à l’èlève qui, dans la même année, avait remporté huit premiers prix dans les hautes sciences.