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poursuit l’effet, ne peuvent être appliquées que tardivement sur son œuvre initiale ; elles seront en quelque sorte surajoutées au relief. De là, une cause d’infériorité. Le sculpteur a d’abord cherché la forme ; c’est à travers les pleins, les saillies, les dépressions méplates, les contours qu’il a vu sa pensée traduite ; la couleur ne sera donc guère qu’un vêtement d occasion pour son œuvre. L’observateur ne s’y trompera pas. Le peintre au contraire a vu dès le premier instant les jeux de lumière, les gradations de tons, la gamme retentissante ou discrète qui convenaient à l’expression du sujet dont il est hanté.

La sculpture, dans ses manifestations les plus célèbres, les plus admirées, depuis les marbres du Parthénon jusqu’à ceux de San-Lorenzo de Florence, est monochrome.

Il s’ensuit que l’art du relief est plus conventionnel encore que l’art du peintre. Il exige, pour être saisi et goûté, une complicité de l’œil et de l’esprit que ne réclame pas la peinture. Celle-ci reproduit la couleur des chairs ; la sculpture n’atteint que la forme d’une tête ou d’une main, et, par surcroît, elle simplifie, elle idéalise, elle tend à l’impersonnel lorsqu’elle a devant elle la personne. Un buste, une statue sont-ils jamais ressemblants, d’une manière absolue si on les compare au modèle vivant ? Oui, pour le spectateur qui sait lire la langue des formes, et qui, par conséquent, sait à quelles lois précises, inéluctables, est soumise cette langue essentiellement simple et sévère. Non, pour celui dont l’œil sans expérience, sans initiation préalable se reporte avec exigeance sur le modèle pour s’enquérir de la vérité de l’image. La sculpture n’a pas pour mission de reproduire textuellement les traits, la carnation de la tête humaine, elle évoque, elle rappelle l’impression que la vue de l’homme de pensée, de la femme, de la jeune fille provoquait par l’ascendant irrésistible du génie ou de la beauté. C’est un poète du marbre qui a dit : « La sculpture ne peut jamais prétendre à nous rendre l’illusion complète de la vie. Elle est l’apparition de l’âme ; c’est à l’âme qu’elle doit s’attacher, car il n’y a que l’âme qui soit immortelle. Le corps, avec ses imperfections maladives, doit rentrer dans la terre ; l’âme, au contraire, doit se refléter sur la terre par une statue. » La sculpture est au premier chef un art fait de synthèse. Elle exprime, elle ne