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impressions

plus douces et les plus pures y descendent sur l’âme comme une rosée embaumée, et l’homme sent le besoin de tomber à genoux devant le spectacle grandiose de toutes ces merveilles qui roulent paisiblement sous le souffle de Dieu ! J’ai assisté il y a quelque temps à l’un des plus beaux couchers de soleil qu’il m’ait jamais été donné de contempler. Je voudrais en balbutier les prodiges.

Le petit sentier qui mène à la falaise un peu plus bas que l’Église, et se dirige vers l’occident, est bordé de grands arbres dont la ramure épaisse se réunit à la cime et forme, au-dessous, un véritable tunnel d’où l’ombre ne sort pas.

Ce jour là, il y avait eu un orage formidable ; mais sur les cinq heures, la grande lutte des éléments s’était terminée : « Les clairons forcenés de l’espace s’étaient tus, » dirait le Maître ! Le soleil, dont les rayons avaient été interceptés par d’énormes nuages, pareils à de vastes lambeaux de draps mortuaires, s’étalait avec majesté !

Il s’était baissé jusqu’à l’ouverture du passage d’arbres. On eût dit l’œil d’un titan y plongeant un regard. Je parcourus d’un pas rapide, l’enthousiasme au cœur, l’espace enflammé qui me séparait de mon poste ordinaire d’observation. Le fleuve coulait silencieusement. Un souffle à peine sensible en ridait les flots qui avaient l’air d’envoyer au soleil une infinité de sourires que le grand astre se plaisait à iriser. Il me semblait