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LES DISCIPLES À SAÏS

mais celui qui éprouve le désir profond de la Nature, celui qui cherche tout en elle, et qui est pour ainsi dire l’instrument sensible de son activité secrète, celui-là ne reconnaîtra pour maître et pour confident de la nature que l’homme qui parle d’elle avec foi et avec gravité, l’homme dont les discours ont la merveilleuse, l’inimitable force de pénétration et d’inséparabilité par laquelle se distinguent les évangiles et les inspirations véritables. Il faut que les dispositions favorables de ces âmes soient, dès l’âge le plus tendre, soutenues et cultivées avec un zèle ininterrompu dans le silence et dans la solitude, car trop de paroles troublent l’application nécessaire ; il y faut aussi une vie discrète et simple comme celle d’un enfant et une patience infatigable. Il est impossible de déterminer le temps au bout duquel elle livre ses secrets. Quelques élus les obtiennent alors qu’ils sont encore jeunes ; d’autres seulement dans un âge avancé. Le chercheur véritable ne devient jamais vieux ; toute passion éternelle est hors du domaine de la vie, et plus l’enveloppe intérieure se fane et se dessèche, plus le noyau devient clair, éclatant et puissant. Ce don ne dépend pas de la beauté extérieure, de la force, de la pénétration ou de quelque avantage humain. Dans toutes les positions, à tous les âges et dans toutes les races, à toutes les époques, sous toutes les latitudes, il y eut des hommes que la Nature élut pour en faire ses enfants préférés et qui furent favorisés du don de la perception intérieure. Souvent ces hommes parurent plus naïfs et plus maladroits