Page:Octave Mirbeau - Dingo - Fasquelle 1913.djvu/275

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Il alla même plus loin pour me mettre à mon aise et m’enlever tout remords.

— Bah ! fit-il presque gaiment… Cela ne fait rien… cela ne fait rien… Au contraire…

Irène, à bout de courage, s’était effondrée sur un banc de pierre et, la tête dans ses mains, elle pleurait, sanglotait, suffoquait de douleur. Sa mère l’emmena.

— On t’en donnera un autre, ma chérie !… un bien plus joli…

— On t’en donnera deux, surenchérit Legrel.

Il regarda longtemps Irène qui s’éloignait, la tête penchée sur la poitrine de la bonne Mme Legrel…

— Pauvre petite ! soupira-t-il… Elle est si nerveuse !… Elle m’inquiète parfois… Bah ! il n’y paraîtra plus demain.

Je le vois encore, je le verrai toute ma vie, lorsque nous rentrâmes. Il cherchait des paroles amies et n’en trouvant pas qu’il n’eût dites au moins cent fois, il essayait — ah ! si franchement — de dériver vers n’importe quoi le cours de mes idées et il me disait, bégayant :

— Dans la vie, voyez-vous, on n’a jamais que des ennuis… Tenez… moi… j’ai bien de la peine avec mes araignées. C’est bien plus difficile à élever que des moutons… Croiriez-vous, mon cher, qu’il m’est souvent arrivé, sous une cloche où j’en avais mis huit, de n’en plus trouver le lende-