Page:Octave Mirbeau - Dingo - Fasquelle 1913.djvu/296

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sur mon bureau, était immobile comme une statuette de bronze noir et songeait, les yeux mi-clos :

— Je passais… et savez-vous une idée qui m’est venue ?

— Enchanté de la connaître…

— Oui… une excellente idée, je crois… excellente… Alors, vous me permettez de vous en faire part ?

— Je vous en prie…

— C’est que, vraiment je n’ose pas… je n’ose plus…

— Allez donc !

— Eh bien je me décide…

Dingo réveillé se mit à s’étirer, en bâillant bruyamment. Puis, sans s’occuper de M. Lagniaud, il alla gratter à la porte qui donnait sur la terrasse.

Pour ne pas être forcé de le voir, le maire poussa son fauteuil face au mur, de manière à tourner le dos au chien. Miche, d’un bond leste, sauta sur le tapis et suivit Dingo. Je leur ouvris la porte et ils disparurent en courant.

M. Lagniaud avait le menton et les yeux méditativement levés vers le plafond.

Quand je fus revenu à ma place, le maire dérangé par ce petit incident resta silencieux quelques secondes. Il cherchait à renouer le fil cassé de son discours.