Page:Octave Mirbeau - Dingo - Fasquelle 1913.djvu/364

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placard de coton iodé couvrait sa poitrine. Maintenant que j’étais assis en face d’elle, que j’apercevais, hors du peignoir flottant, sa nuque amaigrie, ses mains fragiles et mal lavées, ses poignets presque décharnés sous la peau presque transparente, je n’avais plus de doute sur sa maladie. Et il me sembla que sa sœur, quand Lina toussait, jetait sur elle un regard apitoyé.

— Je passais rue Le Peletier, dit Lina Lauréal, quand le chien est venu vers moi… il me regardait… il remuait la queue… je l’ai caressé… j’adore les bêtes… Il n’avait pas l’air d’un chien perdu… oh, pas du tout… J’ai regardé de tous les côtés… je pensais apercevoir son maître… Mais personne… Le chien venait avec moi… J’étais bien étonnée… Je lui ai dit doucement : « Va-t’en, va-t’en, cherche ton maître… » Mais il se posait devant moi, il levait la tête… On aurait dit qu’il voulait me parler. Et quand je marchais, il me suivait, ou plutôt il allait devant moi, il tournait la tête pour ne pas me perdre… Quand nous sommes arrivés devant la maison, je ne savais pas trop que faire… L’empêcher de monter ? j’avais peur qu’on le mène à la fourrière. Et puis, il avait peut-être faim. Je ne lui ai rien dit… je ne l’ai pas appelé. Mais il a monté l’escalier avec moi. Et une fois dans la chambre, il a été si gentil, si obéissant… Je lui ai