Page:Octave Mirbeau Un gentilhomme 1920.djvu/102

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que j’en avais… Et je me vengeais de mon embarras en invectivant grossièrement toutes ces turqueries ignobles, tout ce bric-à-brac de bazar qui nous entourait…

Quand il eut fini de lire, il se promena de long en large dans la pièce, les mains croisées derrière le dos, le visage plus sérieux, le front barré comme par une forte tension de son esprit… Les idées se brouillaient dans ma tête un peu meurtrie ; et je sentais le sommeil m’envahir…

Enfin, tout en continuant de marcher, le marquis me dit :

— Écoutez, mon cher… Je vais vous donner une preuve de ma confiance, et j’espère que je n’aurai pas à le regretter… Je vais vous mettre brièvement au courant de certaines choses, encore très secrètes… Par conséquent, pas un mot, jamais, à personne, n’est-ce pas ?

Sa voix était changée, elle avait presque de la solennité, une sorte de lourdeur oratoire. Il poursuivit, après avoir allumé un autre cigare :

— Il va se passer d’ici peu des événements politiques très importants… Vous connaissez la situation actuelle… Elle est intolérable. La France se laisse de plus en plus dominer par les jean-foutre révolutionnaires, et surtout elle se laisse pourrir par des doctrines antireligieuses… abominables. Le mal n’est pas encore