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des moyens si sûrs de perdre ma patrie ? Tu as vu que tu échouerais éternellement contre elle, si tu ne t’attachais à perdre, dans l’opinion publique, ceux qui, depuis cinq ans, ont déjoué tous tes projets. Tu as compris que ce sont ceux qui t’ont toujours vaincu qu’il fallait vaincre ; qu’il fallait faire accuser de corruption précisément ceux que tu n’avais pu corrompre, et d’attiédissement ceux que tu n’avais pu attiédir. Avec quels succès, depuis la mort de Marat, tu as poussé les travaux du siége de leur réputation, contre ses amis, ses preux compagnons d’armes, et le navire Argo des vieux cordeliers !

C’est hier surtout, à la séance des jacobins, que j’ai vu tes progrès avec effroi, et que j’ai senti toute ta force, même au milieu de nous. J’ai vu, dans ce berceau de la liberté, un Hercule près d’être étouffé par tes serpents tricolores. Enfin, les bons citoyens, les vétérans de la Révolution, ceux qui en ont fait les cinq campagnes, depuis 1789, ces vieux amis de la liberté, qui, depuis le 12 juillet, ont marché entre les poignards et les poisons des aristocrates et des tyrans, les fondateurs de la République, en un mot, ont vaincu. Mais que cette victoire même leur laisse de douleur, en pensant qu’elle a pu être disputée si longtemps dans les jacobins ! La victoire nous est restée parce qu’au milieu de tant de ruines de réputations colossales de civisme, celle de