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coin, et entre les deux chandelles ? On voit que les bourgeois le Paris, l’an 2 de la République, ne ressemblent pas mal encore à ceux de Rome du temps de Vitellius, comme ceux de Rome ressemblaient à ceux d’Athènes, du temps de Platon, dont ce philosophe disait, dans sa République imaginaire, qu’il n’avait rien prescrit pour eux, cette classe étant faite pour suivre aveuglément l’impulsion du gouvernement et des plus forts. On se battait au Carrousel et au Champ-de-Mars, et le Palais-Royal étalait ses bergères et son Arcadie. À côté du tranchant de la guillotine sous lequel tombaient les têtes couronnées, et sur la même place, et dans le même temps, on guillotinait aussi Polichinelle qui partageait l’attention. Ce n’était pas l’amour de la République qui attirait tous les jours tant de monde sur la place de la Révolution, mais la curiosité, et la pièce nouvelle qui ne pouvait avoir qu’une seule représentation. Je suis sûr que la plupart des habitués de ce spectacle se moquaient, au fond de l’âme, des abonnés de l’opéra et de la tragédie, qui ne voyaient qu’un poignard de carton, et des comédiens qui faisaient le mort. Telle était, dit Tacite, l’insensibilité de la ville de Rome, sa sécurité dénaturée et son indifférence parfaite pour tous les partis. Mais Vespasien, vainqueur, ne fit point embastiller toute cette multitude.

De même, croyez-moi, dignes représentants,