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point, comme le procureur de la commune, le Père Duchesne, dans un certain numéro, qu’on égorge les enfants de Capet ; car si la politique a pu commander quelquefois aux tyrans d’égorger jusqu’au dernier rejeton de la race d’un autre despote, je crois que la politique des peuples libres, des peuples souverains, c’est l’équité ; et, en supposant que cette idée, vraie en général, soit fausse en certains cas, et puisse recevoir des exceptions, du moins on m’avouera que, quand la raison d’état commande ces sortes de meurtres, c’est secrètement qu’elle en a donné l’ordre, et jamais Néron n’a bravé la pudeur jusqu’à faire colporter et crier dans les rues l’arrêt de mort de Britannicus et un décret d’empoisonnement. Quoi ! c’est un crime d’avilir les pouvoirs constitués d’une nation et ce n’en serait pas un d’avilir ainsi la nation elle-même, de diffamer le peuple français en lui faisant mettre ainsi la main dans le sang innocent à la face de l’univers.

Je crois que la liberté c’est l’humanité ; ainsi, je crois que la liberté n’interdit point aux époux, aux mères, aux enfants des détenus ou suspects de voir leurs pères ou leurs maris, ou leurs fils en prison ; je crois que la liberté ne condamne point la mère de Barnave à frapper en vain pendant huit jours à la porte de la Conciergerie pour parler à son fils, et lorsque cette femme malheureuse a