telet de fer, se cherchèrent avec franchise. Les visières des casques se levèrent, et bien des amis se reconnurent dans les rangs opposés. — Les uns se livrent aux plaisirs de la table, les autres, poussant des cris joyeux, s’exercent à différens jeux, et la boule, les dés, les dames et le ballon (2) les aident à passer la journée.
Si pourtant le cor avait fait entendre le signal de la guerre, ces guerriers confondus avec tant de franchise, ces mains qui se pressaient avec tant de cordialité, auraient ensanglanté la terre. Les rives du Teviot, au lieu de retentir de cris de joie, n’auraient plus entendu que le cri terrible de la guerre et les gémissemens de la mort : les whingers[1], employés dans le festin à un usage pacifique, auraient versé le sang des convives. Ce passage soudain de la paix à la guerre n’était autrefois ni rare ni regardé comme étrange sur les frontières (3). Cependant tout était en paix dans le château de Branksome et dans les environs quand le dernier rayon du soleil en couronna les créneaux.
Ces signes heureux d’une joie bruyante ne cessèrent pas avec le jour. Bientôt on vit sortir des hautes fenêtres grillées de la grande salle de Branksome des rayons d’une clarté qui succédait à celle du soleil, et les lambris continuèrent à retentir des sons de la harpe et du choc des verres. Cependant dans toute la plaine, sur laquelle les ombres commençaient à se répandre, on entendait appeler et crier ; chaque clan cherchait à réunir ses traîneurs en frappant leurs oreilles du mot de ralliement, tandis que ceux qui étaient encore à table portaient à haute voix des santés en l’honneur de Dacre ou de Douglas (4).
Tout ce bruit s’affaiblit peu à peu, et finit par mourir
- ↑ Espèce de poignard qui servait aussi de couteau à table. — Ed