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grande rapidité, qu’il faut être à même d’accueillir et d’appliquer tout progrès faits ailleurs, afin de maintenir et d’améliorer son rang dans la concurrence générale, amène les chefs d’industries à se tenir au courant de toutes les nouveautés. De là le rôle immense de la littérature technique, grands traités, manuels, annuaires, revues et journaux. Des bureaux d’étude mettent au point toutes les commandes. Dans les grandes usines des laboratoires sont consacrés exclusivement aux recherches : le neuf pour demain (surtout en matière chimique et principalement en Allemagne).

2. À l’organisation du travail président les principes du rendement maximum, « productivisme » et « efficience » des efforts (efficiency). Des ingénieurs sociaux prennent soin de l’agencement intérieur des usines dans ses rapports avec le travail humain (Taylor, taylorisme).

3. Les machines, se développant extraordinairement en force, nombre et spécialité, sont des engins plus ou moins complexes qui comportent toujours une épargne de travail humain remplacé par une force animale ou inanimée. Des métiers perfectionnés obtiennent, en Angleterre par exemple, d’un demi million d’hommes des résultats équivalents à celui de cent millions de tisserands travaillant isolément. De 1870 à 1880 la quantité des chevaux-vapeur utilisée s’accrut par an dans le monde de 1000 chevaux-vapeur par jour, soit, à raison d’un cheval équivalent à 21 hommes de peine, 21,000 unités humaines par jour et 7,665,000 par an. Aux États-Unis, en 1900, on employait deux fois plus de chevaux-vapeur qu’en 1890, quatre fois plus qu’en 1870. Et la puissance des machines grandit. Le marteau-pilon du Creusot pèse 150 tonnes et aplatit un lingot d’acier de 50 tonnes ; l’aciérie de Bethléhem (États-Unis) a une presse de blindage de 5000 tonnes. Des usines géantes sont édifiées, comme celles de Krupp ou de Corkerill, du Creusot ou de Pittsbourg.

4. La division du travail devient extrême : 18 opérations distinctes avec 18 catégories d’ouvriers pour la confection des épingles ; 70 opérations distinctes pour la confection des cartes à jouer ; 1662 opérations successives pour la fabrication de la montre « Oméga »[1]. Chaque industrie se subdivise en spécialités nombreuses : l’horlogerie en 102 métiers, la métallurgie en plus de 1000 métiers. La plus extrême variété des industries coexiste. Ainsi 667 industries et métiers différents recensés en Belgique en 1901. L’industrie à domicile continue à exister à côté de l’usine.

5. L’industrie combine le travail de l’ouvrier, de la machine et de la direction. Le travail de l’ouvrier, c’est de la force physique et intellectuelle ; c’est de la discipline, de la tempérance, l’esprit de famille, d’épargne, de prévoyance, l’éducation professionnelle, l’habileté

  1. G. Galliard, La force motrice au point de vue économique et social, 1915.