Page:Otlet - Problèmes internationaux et la guerre.djvu/258

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

signés avec des autres puissances coloniales pour la délimitation des quatre colonies africaines. En avril 1890 seulement est créé l’Office colonial au ministère des Affaires étrangères. D’alors date le changement dans la politique coloniale allemande. Après un long intervalle, le 6 mars 1890, l’Allemagne obtint de la Chine, sous forme de cession à bail, le territoire adjacent à la baie de Kiao-Tchéou. Enfin, en 1899, elle acquérait de l’Espagne les îles Mariannes et Carolines, et obtenait de l’Angleterre et des États-Unis la reconnaissance de sa domination sur la plus grande partie des îles Samoa[1]. Le jour où l’Allemagne achetait à l’Espagne ses colonies, le ministre von Bülow les qualifiait de « débris d’un édifice écroulé qui seraient les piliers et les contreforts d’un nouvel édifice majestueux ».

La population totale des colonies allemandes était de 12 millions en 1913. La population blanche s’y élevait alors à 27,000. Les importations de ces colonies en Allemagne étaient d’environ 72 millions et les exportations allemandes dans ces colonies d’environ 76 millions. En regard de ce commerce total de 148 millions (11 millions en 1898) il faut placer les chiffres de l’ensemble du commerce extérieur allemand qui s’élèvent à 25 milliards et retenir le fait que le commerce de l’Allemagne avec l’empire britannique n’était pas moindre de 4.250 millions, et avec la seule Inde britannique de 800 millions. L’exportation des produits allemands dans les colonies étrangères est quatre fois plus faible que l’importation en Allemagne des matières brutes de ces régions tropicales. L’Allemagne en effet a un besoin grandissant pour ses industries de matières brutes des régions tropicales ; elle en importe pour 1.342 ½ millions de francs ; elle en exporte pour 332 ½. De là une théorie nouvelle, celle des approvisionnements, corollaire de celle des débouchés.

Au moment de la guerre le principe de la politique coloniale allemande se résumait en ceci : une grande puissance doit disposer dans différentes parties du monde de territoires d’une étendue proportionnelle au nombre de ses habitants et à sa force d’expansion ; c’est là à la vérité une théorie commode pour les Allemands, mais pleine de dangers pour le voisin[2]. La guerre jusqu’ici a fait perdre toutes ses colonies à l’Allemagne.

  1. C. Fidel, Colonies allemandes (publication de la Société des Études coloniales et maritimes) ; L’Allemagne d’outre-mer, grandeur et décadence. — Allemands en Afrique, « Le Correspondant », 10 septembre 1911. — L’Allemagne coloniale et la guerre, « Le Correspondant », 25 janvier 1915. — Pierre Alype, La provocation allemande aux colonies, Paris, Berger-Levrault. — Der Weltpolitik und Kein Krieg (publication anonyme sous les auspices, croit-on, du ministère des Affaires étrangères d’Allemagne). — A. Supan, Die territoriale Entwicklung der europaïschen Kolonien, Gotha, 1906.
  2. Opinion du général von Bernhardi : « Notre population est de 63 millions d’habitants et elle augmente de 1 million par an. Il est impossible que l’agricul-